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Interview : Sophie Bourzanel

Directrice de la Transformation et des Relations Humaines chez i-BP (Informatique Banque Populaire)

Informatique Banque Populaire est une filiale du Groupe BPCE, 2ème groupe bancaire en France, qui assure le développement informatique du système d’information des Banques Populaires. Créée en 2001, l’entreprise compte aujourd’hui plus de 850 collaborateurs répartis sur six sites en France. 

Quels sont les grands facteurs d’évolution auxquels est confrontée votre organisation ?

Ces dernières années, les nouvelles technologies ont profondément modifié le métier de la banque, et par conséquent le positionnement de l’IT dans l’entreprise. L’Informatique est ainsi passée d’un moyen d’optimisation et de ROI à une composante stratégique du métier de banquier. Cette évolution a modifié la manière d’aborder le métier de l’IT, mais également la perception que les clients internes ont de l’IT. 

« La banque, c’est de l’IT, au même titre que le conseil ; de fait, l’IT a désormais un positionnement stratégique pour la banque ».

Plus particulièrement, en tant qu’éditeur de logiciel, nous faisons face à trois enjeux majeurs :

Premièrement, l’évolution des modes de production des logiciels (passage à l’agile) transforme notre culture, nos modes de management, mais également notre positionnement vis-à-vis de nos clients. Cela nous amène aussi à renforcer notre approche Time to market, à revoir la manière dont on répond aux besoins clients et à accélérer nos cycles de production. Ces évolutions interrogent également notre stratégie de sous-traitance vis-à-vis des activités de coding.

« Les méthodes agiles sont déployées depuis 6 ans chez i-BP, c’est un long chemin que cette transformation que nous vivons. »

Deuxièmement, les changements technologiques portés par le digital, qu’ils soient liés aux nouvelles technologies (nouveaux langages de programmation ou de développement) ou aux nouveaux devices (smartphones, tablettes, etc.) nécessitent de renforcer la polycompétence de nos collaborateurs pour qu’ils maîtrisent ces nouvelles technologies et soient en capacité de les intégrer (via le développement des API) avec les technologies plus anciennes, utilisées en particulier par le Core Banking.

Troisièmement, l’avènement de la Data impacte aussi bien les métiers de l’IT qui doivent adapter les technologies permettant l’exploitation des données que les directions clientes qui doivent comprendre les données et leur utilité.

Quelles sont les évolutions de vos métiers et des compétences associées ?

Certains métiers sont particulièrement impactés :

Directement touchés par les évolutions technologiques, les développeurs doivent renforcer leur polycompétence, afin d’intervenir sur plusieurs technologies et être capable d’assumer plusieurs rôles au sein d’une équipe (plus de polyvalence, moins de segmentation des tâches). Ils doivent aussi prendre davantage en compte l’expérience utilisateur.

Les métiers d’architecture doivent également s’adapter à ces évolutions, afin de proposer des architectures agiles dans une logique time-to-market.

Ces évolutions interrogent également le maintien de la dichotomie entre MOA et MOE.

Et bien entendu, les compétences en sécurité informatique doivent être renforcées compte tenu des menaces croissantes en matière de cybercriminalité, ainsi celles liées à la Data.

Face à ces évolutions, quels sont vos enjeux RH et les chantiers en cours et à venir pour y répondre ?

« Il faut accompagner le passage du règne de l’expertise à l’avènement de l’agilité »

Tout d’abord, nous avons des enjeux culturels forts, afin de passer à une culture d’entreprise plus agile. Cela passe en premier lieu par une transformation managériale, les managers n’étant plus légitimés par leur expertise mais par leur capacité à partager les enjeux et à accompagner leurs collaborateurs. Cela implique aussi de modifier le fonctionnement de l’entreprise, nos méthodes et pratiques afin de développer l’intelligence collective, la responsabilisation, l’autonomie et la prise d’initiative de nos collaborateurs. 

C’est ainsi, qu’après des années de séparation entre le Build et le Run, nous avons modifié notre organisation début 2019 pour mettre en place des équipes autonomes responsabilisées sur des pans de SI cohérents au vu du métier de la banque, en charge des évolutions et de la maintenance (mode produit). 

De même, si les méthodes agiles étaient déjà mises en œuvre depuis plusieurs années dans les équipes Projet, nous déployons désormais l’agilité à l’échelle de l’entreprise, ce qui représente des enjeux forts à la fois en matière de conduite du changement et de professionnalisation des métiers.

Nous avons également des enjeux de recrutement importants : aujourd’hui, nous internalisons davantage le métier du développement (coding), auparavant fortement sous-traité. Nous privilégions des profils à haut potentiel capables de s’adapter et de fonctionner en équipes, plutôt que des profils de purs experts.

Côté RH, nous avons dû revoir aussi nos process de recrutement : une approche plus prospective en développant le sourcing sur les réseaux sociaux, la participation de nos collaborateurs dans les process de recrutement aux cotés des managers et de la RH. Une attention particulière est par ailleurs portée aux capacités du candidat à évoluer rapidement et acquérir les compétences souhaitées.

Cela nous a amené notamment à donner une place plus importante aux recrutements de jeunes collaborateurs, en raison d’une moyenne d’âge élevée des collaborateurs de l’IT.

Mais il ne faut pas oublier les anciennes technologies : en dépit des annonces depuis des dizaines d’années sur leur disparition, elles vont perdurer encore quelques dizaines d’années…. Or les écoles en informatique ne forment plus sur ces technologies (Cobol, Mainframe, etc.) et nos collaborateurs sachants seront les premiers à partir à la retraite. Il y a donc un enjeu à les cultiver.

Enfin, nous devons poursuivre nos efforts pour favoriser la mobilité fonctionnelle. En lien avec notre souhait de développer la polyvalence, l’augmentation significative du taux de mobilité, ces dernières années, est une réussite collective, permise à la fois par l’ouverture des managers à ces pratiques et la conviction des collaborateurs de l’intérêt de changer de poste pour développer leur carrière.