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Loi PACTE : Des mesures qui impactent à la marge les métiers titres

Le Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises a pour but de simplifier la création, la gestion, et le rebond des entreprises. Il comporte aussi de nombreuses mesures afin de faciliter l’investissement en actions des français et l’accès au marché financier des entreprises.

La loi PACTE, promulguée en mai 2019, impactera donc les entreprises tout autant que les marchés financiers français et ses acteurs. Les métiers titres ne sont pas en reste. Dès lors, quels changements sont à prévoir pour les métiers titres ?

Quels sont les impacts sur la finance digitale, les infrastructures de marché et la gestion d’actif, et comment les acteurs des métiers titres peuvent-ils s’y préparer ?

Nous aborderons ces différents impacts à travers les nouvelles règles et régulations dans un premier temps, puis les nouveautés quant à la gestion d’actif, et enfin les conséquences de ces nouvelles mesures sur l’attractivité globale de la Place de Paris.

Modification des règles applicables aux émetteurs

Les impacts principaux de la loi agissent dans un premier temps sur les règles applicables aux émetteurs, tant concernant les actions de préférences, les actions gratuites que les bons de souscription. Tout d’abord, la loi PACTE apporte un allègement du fonctionnement des actions de préférence. Historiquement, les droits attachés aux actions de préférence devaient respecter les règles établies par le Code de commerce, soit :

  • Le principe de proportionnalité du droit de vote à la quantité de capital en actions
  • L’option de permettre un vote double pour les actions libérées
  • Les limites du droit de vote

Ces règles persistent, mais ne s’appliquent plus aux émissions d’actions non cotées. Cet allègement permet d’émettre des actions de préférence à droit de vote double sans avoir à libérer des actions et à les inscrire au nominatif.

La loi PACTE apportera également des changements quant aux attributions gratuites d’actions. Le plafond de 10% d’attribution d’actions gratuites sera dorénavant calculé en excluant les actions gratuites qui n’ont pas été attribuées de façon définitive. Ces nouveautés permettent un nouveau regain des attributions gratuites d’actions en assouplissant les attributions d’un important panel d’actions disponibles.

De la même façon que pour les actions gratuites, les bons de souscription de parts de créateurs d’entreprises pourront dorénavant permettre d’associer les salariés et les dirigeants de jeunes entreprises aux résultats de leur société. La loi permettra ainsi de renforcer la motivation et la fidélisation des BSPCE à un public plus large. En plus d’accentuer la fidélisation des BSPCE, la loi impose une transparence plus importante de la part des gestionnaires d’actif et des investisseurs institutionnels dans le but de de renforcer l’engagement à long terme des actionnaires. La loi impose notamment aux sociétés de gestion d’actifs de créer une stratégie d'engagement des actionnaires « décrivant la manière dont elles intègrent leur rôle d'actionnaire dans leur stratégie d’investissement ». Enfin, la loi oblige les sociétés cotées en bourse à publier sur leur site internet les informations sur les conventions réglementées, qui peuvent dorénavant, en cas de manquement, être demandées par toute personne au président du tribunal.

Modernisation des règles applicables à la gestion des actifs

La loi n’impacte pas uniquement les règles appliquées aux émetteurs et aux fournisseurs de services digitaux. De façon plus large, la loi impacte la gestion d’actif dans sa globalité. Elle introduit par exemple de nouvelles possibilités d'investissement par les FCPR (Fonds commun de placement à risque) dans le but de favoriser le recours à ce type de produits. Ainsi, la loi permet d’étendre le quota d’investissement de 50 % en titres de capital ou donnant accès au capital pour inclure dans la limite de 20 % de l’actif :

  • Les titres de capital admis aux négociations sur un marché d’un État de l’EEE
  • Les titres de créance ne donnant pas accès au capital de leur émetteur

Le régime des organismes de financement - ayant vocation à constituer un mode de financement complémentaire pour les entreprises - en matière de recouvrement des créances est également clarifié par la loi PACTE. La loi impose, lorsque des créances sont transférées, que leur recouvrement continue d'être assuré par le cédant ou par l'entité qui en était chargée avant leur transfert.

La loi PACTE permettra également d’élargir l’accessibilité du crowdfunding, notamment via l’éligibilité des titres issus du crowdfunding au PEA-PME, via l’augmentation du plafond d’emprunt en financement participatif pour les entreprises, et par la création d’un visa par l’AMF pour encadrer les ICO. Le montant maximum pour une entreprise qui souhaitait emprunter via le crowdfunding passe de 2,5 millions d’euros avant la loi PACTE à 8 millions € par projet.

Renforcement de l’attractivité de la Place de Paris dans la perspective du Brexit

Enfin, la loi permet d’introduire des modifications pour s’adapter aux évènements mondiaux actuels. En prévision de la sortie définitive du Royaume-Uni de l’Union européenne, la loi PACTE ratifie les dispositions prises par ordonnance en février 2019. Ces dispositions permettront de renforcer l’attractivité de la Place de Paris pour l’étranger. Cela se traduit notamment par la permission de la capitalisation des intérêts échus, pour permettre à un contrat de droit français de se voir adopté par les acteurs européens comme nouveau support de leurs transactions sur produits dérivés. Cette nouvelle règle a pour objectif de faire des contrats cadres ISDA (International Swaps and Derivatives Association) français une référence en Europe en remplacement des ISDA de droit anglais post-Brexit. Cela va inciter les investisseurs à utiliser des contrats français, ainsi les acteurs français du métier titres devront s'adapter à cette nouvelle opportunité pouvant amener à eux de nouveaux clients.

Pour renforcer davantage l’attractivité de la Place de Paris, l’article 77- 18° de la loi PACTE impose certaines contraintes en complément de la directive européenne Mifid 2 : les entreprises qui veulent fournir des services d'investissements à des clients professionnels en France doivent désormais le faire via des succursales implantées dans des pays tiers membres de l’EEE. Les banques du Royaume-Uni doivent donc mettre en place des succursales en EEE pour pouvoir fournir leurs services titres en France. Les succursales en France doivent également se rendre conformes vis-à-vis de l'ACPR.

En conclusion, la loi PACTE impacte les métiers titres dans une moindre mesure. Elle aborde de nombreux aspects différents mais ne les transcendent pas en exigeant de profondes restructurations ; seules de minimes adaptations sont requises. Enfin, il n’apparaît pas nécessaire de mettre en place d’importants projets dédiés au déploiement de cette loi au sein des métiers titres.


Bibliographie :

Loi PACTE, Chapitre 2, Section I, Article 22, Simplification d’accès,

Loi PACTE, Chapitre 2, Section I, Article 23, Renforcement de l’attractivité de la Place de Paris,

Loi PACTE, Chapitre 2, Section I, Article 24, Modernisation des pouvoirs de l’autorité,

Loi PACTE, Chapitre 2, Section I, Article 25, Infrastructure de marché,

Loi PACTE, Chapitre 2, Section I, Article 26, Création d’un régime Français d’offre de jetons,

Loi PACTE, Chapitre 2, Section I, Article 28, Modification des actions de préférence,

Loi PACTE, Chapitre 4, Article 63, Facturation électronique,

Loi PACTE, Chapitre 4 Article 64, Partiel,

Loi PACTE, Chapitre 4, Article 66, Droits des actionnaires / gestionnaires / transparence