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La fin potentielle du LIBOR et son impact opérationnel sur les banques

Le LIBOR[1] au même titre que l’EURIBOR[2] est l’indice de référence incontournable depuis 1986 dans le calcul du taux d'intérêt des contrats de prêts et de nombreux instruments financiers.

En 2012, le « Liborgate », scandale lié à la manipulation du LIBOR, a mis en évidence les limites liées à la constitution de ce benchmark, entrainant ainsi une remise en cause de sa fiabilité. Résultante d'une méthode défaillante dans la fixation du taux de référence (absence de muraille de Chine entre les traders et les administrateurs de taux de référence) et de l'absence de cadre réglementaire, les banques impliquées dans la manipulation du LIBOR ont été sanctionnées par de lourdes amendes.

 

Pour pallier la problématique de la manipulation des indices de référence, l'Union Européenne (par le biais du Parlement et du Conseil Européen) a approuvé en 2016 le « Règlement Benchmark ». Ce dernier est entré en application en janvier 2018 pour les nouveaux taux de référence qui seront utilisés par les banques. Par ailleurs, les BFI devront adopter les transformations organisationnelles nécessaires avant le 1er janvier 2020 afin de répondre aux exigences du régulateur pour les indices de référence déjà existants.

Les mesures réglementaires mises en place imposent aux banques et aux institutions financières au sens large une réorganisation interne afin d’éviter toute forme de conflits d’intérêts, notamment en séparant clairement les collaborateurs qui contribuent à la définition du taux de référence de ceux qui sont en charge de la relation client. Elles demandent également aux BFI de mettre en place des rapports fréquents sur les benchmarks utilisés pour construire leurs produits financiers.

L'émergence d’indices de référence alternatifs au LIBOR

Malgré les efforts mis en œuvre pour réglementer les taux de référence, l'image du LIBOR a été affaiblie, menaçant ainsi son utilisation durable et pérenne. Le manque de confiance des acteurs économiques favorise ainsi l'émergence d’indices de référence alternatifs au LIBOR.

La remise en question de la viabilité de l’indice, principalement au niveau des emprunts interbancaires à court terme, a entrainé progressivement un détachement des institutions financières qui l’utilisent de moins en moins. Convaincus que le LIBOR n'a pas rempli ses principaux objectifs et qu’il n'est pas durable sous sa forme actuelle, certains régulateurs ont déjà exprimé leur volonté de voir les institutions financières utiliser des alternatives au LIBOR. Ainsi, la FCA (Financial Conduct Authority) a demandé l'introduction de « solutions de rechange fiables d'ici 2021 ».

En cas de disparition de l'indice, les banques devront trouver un substitut et gérer la transition pour les contrats existants basés sur le LIBOR.

Le défi d’une alternative au LIBOR

Hormis les taux de référence alternatifs en cours d’étude par les différents administrateurs et régulateurs des principaux marchés financiers (cf. tableau suivant), les Risk Free Rates (RFRs) semblent se positionner comme des indices de substitution du LIBOR.

 

Cependant, le principal défi pour assurer la transition entre le LIBOR et l’un (ou plusieurs) de ces taux sera d’assurer une transition opérationnelle durable, qui semble difficile en raison de principales différences listées ci-dessous :

le LIBOR est un taux prospectif basé sur sept différents types de maturité[3] alors que les RFRs sont des taux rétrospectifs basés sur des rendements historiques.

les RFRs sont spécifiques à la devise (et publiés à différents moments de la journée) alors que le LIBOR est coté sur la même base pour chaque devise et publié à 11 heures chaque matin

Une autre problématique à laquelle les diverses parties seraient confrontées tourne autour de l'atténuation des perturbations potentielles sur les marchés financiers, exacerbées par la présence généralisée du LIBOR au sein des contrats. Un retrait brutal du LIBOR au niveau des contrats entraînerait de graves perturbations sur le marché.

Points d’attention

Bien que le principal défi à relever par les institutions financières reste la nécessité de trouver un indice alternatif efficace et de conduire une substitution effective du LIBOR par l'indice alternatif sélectionné, la disparition possible du LIBOR implique la mise en place d’un plan de conduite du changement significatif qui inclurait la modification des contrats existants basés sur le LIBOR comme taux d'indexation.

Dans ce cadre, une modification législative semble être la solution la plus attrayante. Son objectif serait de modifier ultérieurement l'interprétation du "LIBOR", lorsqu'il est utilisé dans un contrat, comme étant une référence à un nouveau taux de référence.

Toutefois, elle soulève d’autres difficultés puisqu’elle ne prévoit pas nécessairement des dispositions de repli permettant de facturer des taux d'intérêt appropriés pour les contrats existants, tandis qu’il serait nécessaire d’insérer un nouveau taux de référence dans la documentation pour les nouveaux contrats.

 

[1] London Inter-Bank Offered Rate. Cet indice est déterminé quotidiennement par les principales banques de financement et d’investissement (BFI) situées à Londres en effectuant la moyenne des taux annoncés appliqués d’une banque à l'autre.

[2] Euro Interbank Offered Rate

[3] 1 jour (overnight), 1 semaine, 2 semaines, 1 mois, 2 mois, 3 mois, et 12 mois.